La Gazette du Sorcier - Edition Poudlard12

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Elle court, elle court, la rumeur...


Elle court, elle court la rumeur


De quoi parlent les groupes d'amis aux Trois-Balais ? Que cherchent les élèves qui se promènent en solitaire dans le Château et ses alentours ? Que lancent les personnes espiègles qui s'ennuient ou veulent s'amuser un peu ? La réponse est simple : des rumeurs. On ne peut plus faire quoi que ce soit sans alimenter les commérages. Le moindre petit geste insignifiant suscite l'intérêt d'un spectateur à l’affût, et celui-ci s'empressera de transformer une simple action inintéressante en ragot qui prendra une ampleur considérable. Si je bouscule un Serpentard par mégarde, je peux être certaine que quelques heures plus tard j'entendrai des murmures choqués sur mon passage : "Eh, c'est pas la Serdaigle qui sort avec un serpent ? Ils devraient avoir honte..." ou "Tu vois la brune, là ? On l'a vue en train de faire du rentre-dedans à un pauvre Serpentard qui n'avait rien demandé, quelle mal-élevée." Et si un Poufsouffle bavarde avec un Professeur à la fin d'un cours pour une raison inconnue et certainement innocente, il s'attirera à coup sûr des regards de mépris de la part de certains élèves, à qui on aura confié entre temps que le blaireau en question tente de faire gagner des points à sa maison par l'intermédiaire de pots-de-vin.

Il arrive bien évidemment que certains commérages soient tout à fait exacts, que certains espions soient dans le vrai. Comme la fois où quelqu'un dont je ne citerai pas le nom m'a dit que Ellana Denver allait démissionner de tous ses postes et qu'il y aurait bientôt des recrutements de Rédacteur et de Professeur d'Arithmancie - d'ailleurs la même source m'avait également confié  qu'une certaine Everleight Mitchell allait quitter le Château, ce qui signifiait qu'un nouveau formateur en Légilimancie allait être recruté, et elle avait encore une fois vu juste. Mais il faut être honnête : cela n'arrive qu'une fois sur cent. Si toutes les rumeurs étaient véridiques, certains seraient mariés, auraient quatre enfants de pères différents, et seraient déjà morts trois fois, à seulement treize ans... Le pire dans cette histoire, c'est que les colporteurs de ragots se retrouvent parfois au statut de victime, crient à l'injustice et à l'acharnement, puis recommencent à colporter des rumeurs quelques jours plus tard comme si de rien n'était. N'avons-nous donc plus le droit à une vie privée ? Doit-on se tenir aux aguets chaque fois que nous nous risquons à mettre le pied dehors ? Devons-nous vivre dans la crainte permanente que chacun de nos gestes soit mal interprété ? Pourrons-nous un jour cesser nos efforts constants pour dissimuler notre vie aux yeux des autres, en vain car nous savons très bien que tout finit par se savoir à Poudlard ?

Certes, c'est amusant de se retrouver aux Trois-Balais autour d'une Bièraubeurre - ou d'un thé pour les érudits - avec quelques amis pour s'échanger les derniers potins en date sur le professorat ou les personnes connues du Château. Certes, c'est un excellent moyen de se remonter le moral dans des moments de tristesse et de désespoir, car quoi de mieux que de discuter des malheurs des autres pour se rendre compte que notre vie n'est pas si misérable qu'on ne le pensait ? Mais ce serait bien de réaliser que ces racontars peuvent détruire la vie de ceux qui en sont la cible. De plus, tout le monde sans exception se retrouvera un jour victime de ces ouï-dire tant appréhendés. Alors pourquoi ne pouvons-nous pas trouver d'autres activités bien plus intéressantes et utiles à pratiquer ? Ce n'est pourtant pas ce qu'il manque ici. Malheureusement, il semble évident que ce miracle ne se réalisera jamais, alors il va sans doute falloir apprendre tant bien que mal à vivre avec. Pour ma part, je n'ai qu'une chose à dire pour conclure : "Laissez-moi vivre en paix !"


Article écrit par Flora Cook, illustration de Wilde.

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