La Gazette du Sorcier - Edition Poudlard12

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Les Lauriers de César

(Attention : Cet article fait mention de crimes sexuels.)

Moi, Germaine Bêtabondieu, botaniste, j’ai été invitée à la dernière cérémonie des Césars Moldus (pour avoir tenu un rôle mineur dans un film d’un ami). J’étais aussi invitée à celle des Césars Sorciers, mais par un aléa de circonstances, les deux cérémonies se sont tenues le même jour et j’ai donc dû faire un choix. Et je me suis dis « pourquoi pas ? ». Il faut bien parfois que nos deux mondes se côtoient.

 

 

La cérémonie a débuté avec des gens qui dansaient sur scène dans des tenues très excentriques (peut-être que c’est la nouvelle mode moldue ?) puis une femme, un peu petite, tout en noir, est arrivée. Mon ami réalisateur m’a dit que c’était « Florence Foresti, une humoriste ». Elle était très drôle ! Mais je n’ai pas tout compris à ses blagues. À un moment elle a parlé… D’Atchoum ? Évidemment, une bonne chercheuse fait toujours des recherches et je m’étais tenue au courant de la liste des nommés de cette année. Pour autant je n’avais aucun souvenir de ce Atchoum. J’ai demandé à mon ami. Il a eu l’air mal à l’aise et m’a dit de ne pas m’en faire. Cela ne me suffisait pas; j’ai insisté. Visiblement contrarié, il a dit que Atchoum était un surnom dégradant se référant à Roman Polanski (ah oui, me rappelais-je ! Le réalisateur de ce film sur Émile Zola) qui aurait été accusé de pédophilie voire de viol. « Mais » s’est-il empressé d’ajouter « son film est vraiment grandiose ». Il a aussi murmuré qu’on était là pour le cinéma et pas pour ouvrir une séance de tribunal. Vous savez, moi, toutes ces affaires de moldus, je m’en fiche un peu. Je me demandais juste comment allait Sylvie, mon amie, qui avait joué dans « La Bête du Gévaudan » (un film avec un vrai loup-garou dans le rôle de la Bête) qui avait été nommé à nos Césars.

Les Césars moldus se sont poursuivis; il y avait des remises de prix, des petits discours et à chaque fois qu’un titre, un nom était donné, des applaudissements. Bref, exactement comme par chez nous. Mais vint finalement la catégorie « Meilleur réalisateur ». Le gagnant fut Roman Polanski. Mon ami applaudit évidemment très fort et me redit que je devais absolument voir sa filmographie si « brillante ». Et soudain, voilà qu’une jeune femme, quelques rangs devant nous, se lève brutalement. Elle porte une très belle robe bleue et elle hurle « la honte ! » avant de quitter la salle. Oui, elle quitte carrément la salle. Je demande à mon ami qui c’était. À nouveau, il a l’air gêné. Il finit par répondre. « C’est Adèle Haenel, elle a subi un peu de harcèlement quand elle avait quinze ans par le réalisateur Christophe Ruggia ». Je trouve que c’est compréhensible de sa part de partir vu les accusations portées sur Roman. Ça doit lui rappeler de mauvais souvenirs. Mon ami est d’accord avec moi, mais il me rappelle qu’il faut tout de même « distinguer l’artiste de l’homme ». Je ne réponds pas. La cérémonie s’achève. L’humoriste ne veut pas remonter sur scène.

Sur le chemin du retour, je pense à tout ça. Je viens de recevoir un patronus de Sylvie, toute fière parce que « La Bête du Gévaudan » a reçu le César du meilleur acteur. Je souris – et puis je me rappelle que ce film avait fait polémique chez nous. Au début, il voulait prendre un sorcier qui se transformerait en loup-garou. Il y a eut un tollé de la part de la communauté des lycanthropes et ils ont finalement changé d’acteur. Il y avait eu aussi ce film sur la vie de Dumbledore et Grindelwald, entre fiction et documentaire. Tout le monde connaît la relation qui les unissait, mais le réalisateur a préféré leur faire dire qu’ils s’aimaient « comme des frères ». Polémique. On a dit que c’était parce que Grindelwald était un mage noir, que ce serait comme montrer Voldemort avec un ami, que ça pourrait donner un mauvais exemple aux plus jeunes… Ce n’était même pas la seule polémique de ce film : l’acteur qui jouait Grindelwald avait été accusé de violences conjugales. Beaucoup avait compté sur la célébrissime historienne et biographe J.K. Rowling pour obtenir son renvoi, mais elle avait au contraire apporté son soutien à l’acteur.

 

 

Je marche sous une bruine qui vient de commencer à tomber et je m’interroge. Nous pouvons distinguer l’homme de l’artiste – apparemment, nous le faisons déjà avec brio – mais l’homme lui-même, peut-il se distinguer de l’artiste ? L’artiste n’est-il pas influencé par l’homme ? Qu’est-ce que j’en sais. Je ne suis que botaniste, moi, je rempote des Mandragores toute la journée.

 

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Commentaires

1. Le 6 mars 2020, par Bernadette

Holala... l'on pourrait débattre tellement longtemps sur les degré des crimes et les hommes derrière...
Bel article. Sérieusement.
Mais je tairais mon opinion, je ne tacherai pas la gazette de mes aversions moldues en rapport avec cette affaire.

2. Le 11 mars 2020, par Lume

Et, finalement, ils ont agressé qui ? la femme ou l'artiste ?
Travail d'équilibriste que cet article ! Intéressant.

:X

3. Le 12 mars 2020, par mirabelle Boutondore

Bien vu Kyle, j'ai apprécié cet article.

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