Flatterie enchanteresse
Par Oddven le 1 oct. 2019, - Edition n°167 - Lien permanent
« - Miroir, mon beau miroir, dis-moi qui est la plus belle ?
- Une jeune fille dans la fleur de l'âge, qui prendra votre place. »
Zcklliiiing ! Le miroir est brisé. La sorcière n'a pas supporté sa destitution du titre de reine de beauté. Attaquée dans son amour propre, elle brise l'objet de son énervement, comme vous écraseriez sans pitié sous votre soulier un botruc trop attachant. La voilà seule, face à elle-même, la remarque encore au travers de la gorge. Cette dame courageuse n'en reste pas là. Décidée à conserver sa suprématie sur les autres personnes de son sexe, elle s'apprête à rendre visite à l'infante.
Auparavant, elle prépare son subterfuge avec attention. Elle sort son chaudron, sa baguette, son nécessaire à potions et se met à l'ouvrage. Réaliser un philtre du mort vivant n'est pas une mince affaire. Cela requiert toute son attention et son talent de potionniste. La magicienne n'éblouit pas par son apparence physique, mais il faut lui reconnaître ses talents manuels. Elle ajoute le dernier ingrédient, puis réfléchit à l'introduction de son poison dans le camp adverse. Cela n'est pas bien difficile de tromper la bonté ennemi. En mimant la charité, la sorcière voit sa pomme contaminée acceptée. Sa rivale, naïve jeune fille, ne tarde pas à sombrer dans un profond sommeil. Ça y est, notre sorcière dépasse toute la gente féminine. Toute fière, elle peut se promener sur le chemin de Traverse et attirer les regards des beaux garçons.
Vous connaissez sans doute depuis votre plus tendre enfance ce conte de Charles Perrault, Blanche Neige. Penchons-nous aujourd'hui sur les motivations de notre congénère, si vous le voulez bien évidemment, sinon passez votre chemin. La sorcière désirait être la plus belle. Au lieu de s'embellir, en réalisant d'autres potions de beauté -Nul doute qu'elle en réalisait déjà quotidiennement- elle a préféré éliminer sa rivale. Cette méthode est la plus simple et efficace. Retenez qu'il est plus aisé de sombrer dans la médiocrité plutôt qu'atteindre l'excellence.
Arrêtons-nous maintenant sur la destruction spontanée du miroir. Comme un hypogriffe, la sorcière a réagi vivement pour éliminer celui qui la critiquait. Elle reflète une réalité commune. Beaucoup, d'humains comme d'animaux, détestent être critiqués. Nous pouvons garder dans un coin de notre tête, disons sous notre oreille gauche, qu'il ne faut pas critiquer les autres devant eux, au risque de déclencher leur fureur. Il vaut mieux être médisant derrière leur dos, ou avec des amis. Ainsi les autres personnes confirmeront nos dires ; nous nous sentirons meilleurs ; nous évitons d'heurter l'être fautif ; tout est idéal. Ne soyons pas francs. Souvenons-nous du bras cassé de Drago Malefoy qui avait insulté ouvertement Buck. Pour ceux ayant une courte mémoire, voici un rapprochement facile à retenir : hypogriffe-hypocrisie. Vous ne vous prendrez pas un coup de sabot lors de votre prochain cours de soins aux créatures magiques.
Il faut donc flatter son interlocuteur. Soyons respectueux envers autrui, charmeur, envoûteur. Si vous n'êtes toujours pas convaincus, voici un autre exemple féerique. Sensibles à la flatterie, les fées accéderont plus facilement à vos désirs. Complimenter sans limites est un moyen redoutable pour les attraper. L'ancienne chef des aurors, Hell Zaran peut pour en témoigner. Dans le cadre d'une de ses missions, Hybrides, elle demanda à une fée de servir de décoration. La sotte créature obéit immédiatement. Sa méthode fut plus efficace que mon propre immobulus. Mais cela ne serait pas vrai, si nous nous étions trouvées face à des lutins de Cornouailles. Connaissez donc votre adversaire avant d'agir, cela vaut mieux.
Triste monde en somme. Ces comportements faciles et de grandes efficacités ne sont pourtant pas très beaux, vous en conviendrez. Qui aime parler dans le dos des gens, ne pas dire la vérité, écraser ses adversaires, être hypocrite ? Lockhart peut-être ? J'ai choisi une autre voie. Détestant le mensonge, je préfère transfigurer mon regard pour voir le beau en chacun. C'est, Godric en conviendra, très difficile, mais cela permet d'être en paix avec soi-même, comme avec les autres.